Apprendre à apprendre : le guide complet

15 méthodes pour apprendre vite et bien.
Temps de lecture estimé :
20
min
Publié le
16/10/2024

J'exerce un métier un peu particulier : je relève des challenges à travers le monde, puis je les documente.

Mon premier défi consistait à mémoriser 1000 décimales de Pi en 3 jours.

Après l'avoir réussi, j’ai réalisé deux choses :

  1. Nous sommes capables de bien plus que ce que nous pensons.
  2. Si l’école nous a longuement dicté quoi apprendre, elle ne nous a jamais expliqué comment le faire.

Aujourd'hui, j'ai repoussé mes limites à plus de quarante reprises. À chaque fois, j'ai dû m'adapter à de nouvelles disciplines, qu'elles soient intellectuelles, sportives ou créatives. Pour y parvenir, j'ai testé de nombreuses méthodes avant de développer les miennes.

Je suis désormais certain d’une chose : tout peut s’apprendre, à condition d’avoir les bons outils.

Dans cet article, je vais vous partager les miens. Ce sera dense. Ce sera intense. Et cela vous fera gagner un temps précieux.

Parce qu’apprendre est la compétence suprême qui permet de débloquer toutes les autres.

Programme :

I. Oublier ses préjugés

II. Savoir pourquoi

III. Prendre l’initiative

IV. Apprendre utile

V. Adapter ses méthodes

VI. Trouver son framework

VII. Utiliser la puissance d’internet

VIII. Jouer pour apprendre

IX. Enseigner pour apprendre

X. Combattre l’oubli

XI. Entrer dans le flow

XII. Optimiser sa pratique

XIII. Dépasser la vallée de la frustration

XIV. Comprendre son cerveau

XV. Bien dormir

I. Oublier ses préjugés

Dans ma conférence “Apprendre à apprendre”, je pose cette question :

"Si vous deviez mémoriser 1000 décimales de Pi, de combien de temps penseriez-vous avoir besoin ?"

Les réponses varient d’une dizaine de jours à un an (voire “impossible”). Une fois, j’ai fait la moyenne des personnes dans la salle.

Résultat : 136 jours.

Or, avec les bons outils, tout le monde est capable de relever ce défi en moins d’une semaine. En grandissant, nous nous fixons des croyances limitantes.

Nous ne voyons pas le monde tel qu'il est. Nous le voyons tel que nous sommes.

Nous voyons le monde tel que nous sommes (inspiré par Visualize Value)

Les gens sont souvent surpris quand ils apprennent que je peux réciter l’alphabet à l’envers en moins de 3 secondes. Cela semble irréel. Je m’amuse parfois à leur apprendre en quelques minutes pour observer leurs réactions.

L’apnée m’avait fait le même effet. Quand, après un petit peu de théorie, j’ai essayé pour la première fois de retenir sérieusement mon souffle, j’ai été étonné devant ce chrono qui indiquait 3 minutes. Et aujourd'hui, à chaque fois que j’initie des amis à l’apnée, l’effet est garanti ! Depuis, j'ai poussé mon record au-delà des 5 minutes.

À l’inverse, si j'avais su à quel point le système d’écriture maya était complexe, jamais je n’aurais osé me lancer dans le déchiffrage d’une stèle de plus de 1300 ans.

→ Si vous voulez apprendre quelque chose de nouveau, n’ayez aucun a priori. N’écoutez pas ceux qui vous disent que c’est impossible. Ils parlent de leurs propres limites.

II. Savoir pourquoi

J’ai appris l’espagnol pendant des années à l’école sans être capable d’aligner trois phrases correctement. Les cours m’ennuyaient, et je n’avais pas de bonne raison d’apprendre.

Quand, en 2018, je suis parti seul en Amérique latine, j’ai rencontré des locaux, et au bout de deux mois, je parlais espagnol.

Ce qui a changé, c’était mon pourquoi.

Le “Golden Circle” (inspiré par Simon Sinek)

Quand je suis parti survivre une semaine dans la jungle au Costa Rica, j’ai eu quelques nuits difficiles (entre pluie, froid et piqûres d’insectes). Après deux nuits sans fermer l’œil, mon moral en a pris un coup. Je savais pourquoi j’étais là, et j’ai dépassé cette frustration. Aujourd’hui, j’y repense comme l’une des plus belles semaines de ma vie.

Pour préparer un combat professionnel de muay thai, je me suis entraîné 5h/jour sans relâche, dans la douleur. Plusieurs fois, je me suis retrouvé au plus mal mentalement. J'avais des choses à prouver, à mes coachs, à mes amis, à mes abonnés, à moi-même. Je m'étais engagé publiquement. Un filmmaker me suivait pour réaliser un documentaire. Abandonner n'a jamais été une option, car mon pourquoi était trop fort.

→ Demandez-vous systématiquement pourquoi vous voulez apprendre telle ou telle compétence.

Dans les moments de doute ou de frustration, vous vous souviendrez de votre motivation profonde, et vous n’abandonnerez pas.

III. Prendre l’initiative

Il vous est sûrement déjà arrivé d'être extrêmement motivé à l’idée d’apprendre quelque chose de nouveau et, pourtant, de trouver impossible de vous y mettre.

Au moment de commencer, votre cortex insulaire va s'activer. C’est la région du cerveau qui gère la douleur et le dégoût. L’idée d’apprendre quelque chose de nouveau va générer de l’anxiété. Après tout, pourquoi se donner du mal alors que l’on peut produire de la dopamine facilement en regardant Netflix ou en faisant défiler TikTok ? Alors on trouve des excuses et on repousse.

Existe-t-il un secret pour battre la procrastination et s'y mettre ?

Non... Et oui !

La seule chose que vous pouvez faire, c'est de prendre l'initiative.

→ Lancez-vous avant d’être prêt, car vous ne le serez jamais.

Le meilleur moment pour se lancer, c’est aujourd’hui (inspiré par Visualize Value)

Petit à petit, vous allez entrer dans la zone d’apprentissage. Toute cette anxiété va se dissiper. Plus vous franchirez ce seuil, et plus il sera facile d'y retourner.

C'est peut-être le principe le plus important : prendre l'initiative.

Pénétrez dans la zone d’apprentissage

→ N’essayez pas de sortir de votre zone de confort. C’est contre-productif. Vous irez là où vous n’avez rien à faire, et cela vous démotivera plus qu’autre chose.

→ Allez plutôt à votre limite. C’est là que se situe votre zone d’apprentissage. Ainsi, vous élargirez progressivement votre zone de confort.

IV. Apprendre utile

En 1997, pour sa première grande aventure, Mike Horn a marché 600 km pour rejoindre la source du fleuve Amazone à 5 800 m d’altitude avant de la descendre sur son hydrospeed, soit 6 700 km à travers les canyons pendant 171 jours.

Dans sa conférence, il explique comment il s’est préparé pour survivre en Amazonie. Il a sorti une énorme pile de bouquins sur la faune et la flore. Au lieu d’apprendre les spécificités de chaque plante et de chaque animal, il a réduit la pile au minimum : tout ce qui pouvait le tuer. Au lieu d’apprendre ce qu’il pouvait manger, il a étudié ce qu’il ne pouvait pas manger.

Prenons un autre exemple : pourquoi voulez-vous apprendre à jouer de la guitare ? Si c’est pour faire chanter vos potes en soirées, ne vous embêtez pas avec le solfège et les arpèges. Apprenez les quelques accords qui tournent en boucle dans la plupart des musiques commerciales. En une semaine, le tour sera joué.

C’est le principe de Pareto.

→ Demandez-vous quels sont les 20% qui engendreront 80% des résultats escomptés.

Le principe de Pareto

Personnellement, j’ai toujours eu du mal à lire des livres de développement personnel. Ils m'ennuient. Alors, j’ai élaboré une méthode pour comprendre rapidement les grandes idées d’un auteur, et je l'ai utilisée pour résumer plus de 100 livres.

V. Adapter ses méthodes

On ne mémorise pas 10, 100 et 1000 décimales de Pi de la même manière.

10 décimales

Un adulte sans pathologie est capable de retenir temporairement entre 5 et 9 chiffres pendant une courte durée (environ 30 secondes). 10 décimales, c’est déjà presque trop. Et c’est vrai que retenir 3,1415926535, ce n’est pas évident. Une astuce toute simple consiste à décomposer ces 10 décimales en 5 blocs de 2 chiffres : 3, 14 - 15 - 92 - 65 - 35.

→ Fermez les yeux et essayez de réciter la séquence. Normalement, vous avez déjà réussi à craquer cette limite de 9 chiffres dans la mémoire à court terme.

100 décimales

Pour mémoriser dix fois plus d'informations à long terme, le secret réside dans les histoires. Notre cerveau n'est pas conçu pour retenir ce qui est abstrait. Il est conçu pour analyser les stimuli envoyés par nos sens (en particulier la vue).

→ Vous pouvez encoder des informations (comme une suite de chiffres) dans des images mentales. Créez ensuite des histoires pour les lier dans un ordre logique.

Lors de mes conférences, je raconte une petite histoire dans laquelle une vingtaine de décimales de Pi sont encodées. Sans même les apprendre, les gens sont ensuite capables de les réciter.

1000 décimales

Là, les choses se corsent. Une histoire ne suffira plus. L'idée est de doper l'encodage pour compresser une plus grande quantité d'information dans une seule image.

→ Vous pouvez coupler une table de rappel PAO avec des palais mentaux.

Table de rappel

Une table de rappel permet d’associer une image à un nombre dans une table que l’on connaît par cœur. Au lieu de retenir une suite de chiffres, on crée une histoire entre les différentes images.

Exemple : quand je vois un 67, je pense à ma mère, car c’est son année de naissance.

Table de rappel PAO

Une table de rappel PAO va plus loin en associant à chaque nombre entre 00 et 99 un personnage (P), qui fait une action (A), avec un objet (O). On factorise ainsi 6 chiffres en une seule image. Au plus les associations sont personnelles, au mieux vous vous en souviendrez.

J’ai détaillé comment j’ai construit ma table de rappel PAO dans cet article.

Palais mentaux

Un palais mental est un lieu que vous connaissez si bien que vous êtes capable de vous balader dedans par la pensée.

Vous allez y placer vos images mentales dans des endroits précis (sur le lit, au pied de l’arbre, dans la piscine). L’idée est ensuite de visualiser le déroulement d’une histoire en suivant un chemin logique. Plus l’histoire est loufoque, mieux vous la retiendrez. Cela peut sembler contre-intuitif, mais ajouter des détails permet parfois de mieux se souvenir.

VI. Trouver son framework

J’aborde chaque apprentissage avec le mantra du Jeet Kune Do :

"Absorbe ce qui est utile, rejette ce qui ne l’est pas, ajoute ce qui t’est propre."

J’ai ainsi testé de nombreux frameworks avant de concevoir celui qui me correspond parfaitement. En voici trois que vous pouvez tester pour structurer vos apprentissages.

DiSSS (Tim Ferriss)

D : Deconstruction

→ Quelle est la plus petite unité de connaissance utile ?

Ex : Pour une langue étrangère, ce serait un mot.

S : Selection

→ Principe de Pareto : quelles sont les 20% de ces unités qui conduiront à 80 % du résultat souhaité ?

Ex : Comprendre 90% d'une langue peut prendre 3 mois, alors qu'il faudra 10 ans pour en comprendre 98%.

S : Sequencing

→ Quel est l'ordre le plus efficace pour apprendre ces unités ?

Ex : En anglais, connaître les 100 mots les plus utilisés permet de comprendre 50% de ce que l’on entend. Avec 300 mots, on monte à 65%.

S : Stakes

→ Quels mécanismes psychologiques et sociaux pouvez-vous mettre en place pour conserver de la discipline ?

Ex : Annoncez publiquement votre objectif et une date limite. Demandez à vos amis de vous tenir responsable. Définissez un rappel sur votre calendrier pour apprendre 30 minutes chaque matin avant le travail et récompensez-vous avec un morceau de chocolat.

DiSSS (inspiré par Tim Ferriss)

CaFE (Tim Ferriss)

C : Compression

→ Pouvez-vous compresser les informations les plus importantes sur une seule feuille ? C’est le principe du “One-pager”.

Ex : J’ai condensé des algorithmes sur une feuille pour m’aider à résoudre un Rubik’s Cube en moins d’une minute.

F : Frequency

→ Quelle est la meilleure durée et fréquence, connaissant vos limites et vos objectifs ?

Ex : Faites un planning. Expérimentez pour trouver ce qui vous permettra de dépasser la procrastination, puis engagez-vous comme si vous alliez vous marier.

E : Encoding

→ Comment pouvez-vous créer des ancres mentales pour vous souvenir sur le long terme ?

Ex : DiSSS, CaFE & CDmOD sont de bons exemples. La méthode PAO joue aussi sur ce mécanisme.

CDmOD (Ulysse Lubin)

C : Cibler

→ Quel est l’objectif spécifique et mesurable que vous cherchez à atteindre ?

Ex : Dans ma quête du one-arm handstand, je souhaitais tenir 5 secondes en équilibre sur une seule main.

D : Déconstruire

→ Comment pouvez-vous décomposer l’objectif en sous-objectifs progressifs ?

Ex : Avant de chercher à tenir en équilibre sur une main, j’ai validé 20 milestones. La n°10 était de tenir 1 min sur deux mains. La n°13 était de maîtriser une série de changements de forme avec les jambes. La n°19 était de tenir 15 secondes en équilibre sur une main et un doigt.

O : Orchestrer

→ Comment organiser votre temps pour optimiser vos apprentissages ?

Ex : Pour chaque sous-objectif, j’ai conçu un programme d’entraînement (soit 20 programmes au total). À chaque session, je savais quels exercices je devais faire, dans quel ordre et avec combien de temps de pause.

D : Documenter

→ Comment graver dans le marbre ce que vous apprenez ?

Ex : Je filmais chaque entraînement pour voir ce qui n’allait pas dans ma posture. J’envoyais des vidéos à mon coach en ligne pour obtenir du feedback. J’en partageais certaines en story sur Instagram. Je notais mes ressentis dans un journal après chaque entraînement. J’ai publié une vidéo YouTube, un article et des posts sur les réseaux sociaux.

VII. Utiliser la puissance d’internet

Peu importe ce que vous souhaitez apprendre, il existe quelque part un cours en ligne.

Google est votre ami

Le premier réflexe lorsque l'on s’attaque à une nouvelle discipline, ce n’est pas d’improviser, mais d’aller voir ce qui a déjà été documenté sur Internet.

→ Ne posez pas une question à quelqu’un avant de l’avoir tapé dans Google (ou un autre moteur de recherche).

YouTube est votre meilleur ami

Julius Yego est né dans une famille modeste au Kenya. Il n'y avait même pas d'électricité dans son village. Il devait marcher 8 km pour aller à l'école.

Quand il était jeune, il s'amusait à envoyer des lances en bois le plus loin possible. Il était doué, et il a décidé d'apprendre à lancer le javelot. Il n'y avait aucune infrastructure pour s'entraîner, mais il y avait internet au cybercafé de la ville voisine. Julius regardait les mouvements et les entraînements des champions de javelot sur YouTube, et les répliquait le lendemain avec une détermination hors du commun..

Quelques années plus tard, il est devenu champion du monde du lancer du javelot avec un jet à 92,72 m, devenant alors le 3e meilleur performeur de l'histoire. Il est aussi devenu à cette occasion le premier athlète kényan à remporter un titre international dans une discipline autre que la course à pied. Ce n’est pas étonnant qu’il ait fondé une association au Kenya pour permettre aux enfants d'apprendre à utiliser internet.

→ Ayez le réflexe d’utiliser YouTube comme une plateforme d’éducation.

Copier comme un artiste

Je sais que l’école nous a dit le contraire, mais lorsque l’on apprend, il n’y a rien de mal à copier ceux qui savent faire. Attention, je ne parle pas de plagiat, mais de copier pour apprendre.

Lorsque l’on échoue à copier son artiste préféré, c’est là que l’on crée son propre style.

Lorsque j’ai voulu composer une musique, j’ai commencé par une vidéo YouTube expliquant les fonctionnalités d'un logiciel, et je me suis endormi. Alors j’ai changé mon approche en regardant des personnes composer en live, et je répliquais à l’identique pour comprendre les différents éléments.

Une fois plus à l’aise, j’ai progressivement pris des libertés jusqu’à composer ma propre musique. Elle est médiocre, mais elle a le mérite d’exister. J’ai entendu tellement de personnes me dire que, un jour, ils feraient du son. J’attends toujours.

J’ai utilisé la même approche pour dessiner un visage ou peindre une girafe.

→ N’ayez pas honte de copier ceux qui vous inspirent.

VIII. Jouer pour apprendre

Tous les animaux apprennent en jouant. Nous sommes des animaux.

→ Gamifiez vos apprentissages.

Voilà 3 idées pour apprendre en s’amusant :

  1. Oubliez les notes. Utilisez un système d’expérience.
  2. Ne punissez pas vos échecs. Récompensez vos efforts.
  3. N’apprenez pas seuls. Trouvez un compagnon de jeu ou une communauté.

Pour aller plus loin dans la construction d’un système gamifié, il est important de connaître les concepts inhérents au jeu.

L’un des pionniers du domaine, c’est le taïwanais Yu-Kai Chou. Il a imaginé un modèle basé sur les 8 dynamiques de la motivation humaine appelé Octalysis.

Les 8 dynamiques de la motivation humaine

  1. Epic Meaning and Calling : Le joueur croit participer à quelque chose de plus grand que lui, ou qu'il a été choisi pour accomplir une quête (il est l'élu).
  2. Development and Accomplishment : Le joueur progresse, développe des compétences, et réussit des défis (badges, points, quêtes, leaderboards).
  3. Empowerment of Creativity and Feedback : Le joueur exprime sa créativité, en voit le résultat, et reçoit un retour d’expérience pour se sentir considéré.
  4. Ownership and Possession : Le joueur accumule des richesses (avatar, bien virtuel, monnaie, collection).
  5. Social Influence and Relatedness : Le joueur évalue sa progression dans un contexte social (mentorat, camaraderie, compétition).
  6. Scarcity and Impatience : Le joueur trouve une fierté dans la rareté de ce qu’il possède (objet cher ou temporairement accessible, titre, communauté exclusive).
  7. Unpredictability and Curiosity : Le joueur veut connaître la suite pour continuer de jouer (menant à de l’incertitude et des comportements addictifs).
  8. Loss and Avoidance : Le joueur évite les retombées négatives et essaie de ne rien rater (les événements temporaires jouent sur la peur de manquer).

Un bon jeu réunit un maximum de ces éléments pour impliquer le joueur. Et un bon jeu est un excellent outil pour apprendre.

IX. Enseigner pour apprendre

Enseigner demande tout d’abord de comprendre, puis de synthétiser l’information pour l’expliquer.

Richard Feynman, prix Nobel en 1965 pour ses travaux en électrodynamique quantique, est l'un des plus influents physiciens de la seconde moitié du XXème siècle. Il a, entre autres, participé au projet Manhattan.

Son quotidien consistait à apprendre, à développer des idées complexes, puis à les vulgariser. Par exemple, il explique le feu dans cette vidéo avec beaucoup de pédagogie.

Il approchait chaque apprentissage avec une méthode en 4 étapes :

  1. Choisir le sujet et se documenter
  2. Expliquer l’idée avec des mots simples
  3. Combler ses lacunes
  4. Simplifier et transmettre

Ce qui est intéressant dans ce framework, c’est qu’il intègre l’enseignement à deux reprises.

Le but de la seconde étape est d’être capable de faire comprendre le concept à un enfant de 8 ans. Si vous pensez avoir compris la blockchain, essayez de l’expliquer à votre petit-neveu. Là, vous vous rendrez compte de vos lacunes.

La dernière étape a pour objectif de revoir sa copie en simplifiant pour maximiser la rétention lors de la transmission.

→ Pour mieux enseigner :

  1. Utilisez un langage simple (écrivez comme vous parlez).
  2. Évitez le vocabulaire technique (un enfant doit comprendre).
  3. Utilisez des analogies (comparaisons, schémas, images).
  4. Réduisez la longueur de vos explications (clarté > intelligence).

Ou pour reprendre une célèbre citation de Nicolas Boileau :

"Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément."

C’est aussi sur ce concept que se base la méthode d’enseignement mutuel LdL (pour Lernen durch Lehren) pratiquée en Allemagne depuis les années 1980.

X. Combattre l’oubli

On oublie 60% de ce que l’on a appris en quelques heures, et 80% en quelques jours.

Hermann Ebbinghaus était un philosophe allemand qui a beaucoup travaillé sur la mémoire. Il a tracé une courbe de l’oubli en fonction du nombre de révisions.

La courbe de l’oubli d’Ebbinghaus

Si une compétence demande 4 heures de travail, il sera beaucoup plus efficace de diviser l'apprentissage en 4 blocs de 1 heure plutôt que d'essayer d'apprendre tout d'un coup.

L’un des meilleurs professeurs que j’ai eu commençait chaque cours par une synthèse de ce qui avait été vu lors du cours précédent.

Si vous étudiez de longues heures chaque jour, il existe une manière très simple d’allonger votre courbe de l’oubli.

→ Dès la fin des cours, prenez une feuille blanche, et notez tout ce dont vous vous souvenez. Ces quelques minutes vous feront gagner un temps considérable dans vos futures révisions.

→ Dans cette même optique de ne pas oublier ce que vous apprenez, construisez-vous un second cerveau.

Personnellement, j’ai réuni dans un même espace en ligne un maximum de connaissances, qu'il s'agisse de synthèses de concepts, de résumés de livres ou de bibliothèques de ressources.

XI. Entrer dans le flow

En fonction de la difficulté de ce que vous apprenez et de votre niveau actuel, vous allez vous situer dans l’une de ces zones :

La zone de flow

L’apprentissage sera optimal lorsque vous évoluez dans la zone de flow.

Pour l’atteindre, optimisez votre environnement.

→ Quelques astuces pour entrer dans le flow :

  • Dédiez un moment presque religieux à l’apprentissage.
  • Mettez votre téléphone dans une autre pièce.
  • Donnez 100% de votre attention à la tâche en cours.
  • Soyez patient (cela peut prendre du temps d’entrer dans le flow).
  • Évitez les interruptions (chaque coupure casse le flow).

Le flow se trouve aussi bien dans une pratique créative que sportive.

Dans mon apprentissage du yoga, j’essayais toujours d’adapter la difficulté à mon niveau pour progresser le plus rapidement possible.

C’est aussi en cherchant à atteindre cet état de flow que j’ai réussi à rapidement plonger à -35 m en apnée. J’étais à la fois en relaxation et en éveil, parfaitement ancré dans l’instant présent, en pleine conscience.

De même, je n’ai jamais été aussi concentré que lorsque je suis resté immergé 10 min sans bouger dans l’eau gelée.

Bruce Lee parle du flow avec une analogie bien trouvée :

"Empty your mind. Be formless, shapeless, like water. You put water into a cup, it becomes the cup. You put water into a bottle, it becomes the bottle. You put it into a teapot, it becomes the teapot. Now water can flow or it can crash. Be water, my friend."

XII. Optimiser sa pratique

Réviser, c’est bien.

Se rappeler, c’est mieux.

Être actif est bien plus efficace pour créer des connexions neuronales.

Les cartes mentales

L’idée est similaire aux palais mentaux (cf. partie V) en construisant une représentation visuelle reflétant le cheminement et le développement de la pensée.

→ Plutôt que de lire passivement vos notes, dessinez une carte mentale pour chaque concept étudié.

Par exemple, le déroulement de ma conférence sur les barrières mentales tient sur une feuille A4. Cela me permet de savoir où j’en suis, et de créer un pont avec les concepts enfouis au fond de mon cerveau.

L’idée d’une carte mentale est similaire à celle du one-pager (cf. framework CaFE dans la partie VI).

Les flashcards

L’outil le plus simple et le plus efficace pour se rappeler consiste à écrire d’un côté d’une carte une information, et de l’autre ce que l’on cherche à apprendre.

Cela permet d’être actif dans la construction de son deck, et de s’en servir pour des répétitions espacées et ludiques.

Exemples :

  • Recto : Question / Verso : Réponse
  • Recto : Définition mathématique / Verso : Formule
  • Recto : Artiste / Verso : Ses œuvres les plus célèbres
  • Recto : Image / Verso : Le mot associé dans une langue étrangère

Exemple de flashcard (miaou)

C’est avec cette technique que j’ai mémorisé les drapeaux et les capitales de tous les pays. Je m’en suis aussi servi pour apprendre à lire le géorgien.

→ Vous pouvez utiliser Quizlet pour construire vos flashcards.

Grease the groove

Pour toute pratique physique, les mêmes concepts s’appliquent, si ce n’est que l’on doit prendre plus spécifiquement en compte la fatigue du corps.

Quel entraînement est le plus efficace entre :

  • 2 sessions de 3h
  • ou 6 sessions d’1h30 ?

Évidemment, cela dépend de l’objectif, mais dans la plupart des cas, un volume total d’entraînement de 9h sera plus efficace que seulement 6h.

Sur le court terme, nous sommes au niveau de notre intensité.

Sur le long terme, nous sommes au niveau que notre discipline.

→ Réduisez votre fatigue musculaire pour augmenter votre volume total d’entraînement.

Cette méthode (et l'expression "Grease the Groove") a été popularisée par l’ancien instructeur des Forces spéciales soviétiques Pavel Tsatsouline dans son livre “Power to the People! : Russian Strength Training Secrets for Every American” en 1999.

J’ai conçu mes programmes et la fréquence de mes sessions au one-arm handstand selon ces principes.

Lorsque je m’entraînais pour traverser la Manche en paddle (challenge annulé par les autorités une semaine avant le départ), je faisais attention à ne pas accumuler trop de courbatures pour pouvoir monter chaque jour sur le paddle et m’habituer aux sensations. J’ai progressivement augmenté le volume d'entraînement en passant d’une heure au début à quatre heures de rame le dernier jour.

Quand j’ai appris la magie, j’avais toujours sur moi des cartes et des pièces pour pratiquer quelques mouvements sur chaque temps mort de mes journées. L’idée est la même : augmenter son volume total d’entraînement par tous les moyens possibles.

Cas concret : apprendre une langue

Si je devais apprendre une nouvelle langue, par exemple le japonais, voilà comment je m’y prendrais :

  1. Fixer un objectif clair sur le résultat attendu (par exemple d’être capable de tenir une conversation dans un bar et de parler de mes projets).
  2. Étudier quelques phrases simples (avec la méthode de Tim Ferriss) pour déconstruire la langue et en comprendre les mécaniques.
  3. Dresser une liste des 100 mots les plus utilisés (puis augmenter au fur et à mesure à 300 puis 500 mots).
  4. Construire moi-même des flashcards avec au recto une image (choisie sur Google Image en tapant le mot en japonais pour visualiser ce qu’il représente vraiment), et au verso le mot en japonais (pour éviter la gymnastique de traduction, et apprendre à penser directement dans la langue).
  5. Prévoir un créneau fixe d’une heure chaque jour (sans téléphone) pour apprendre de nouveaux mots (15 min) puis pratiquer avec des jeux (45 min).
  6. Réviser quelques flashcards le soir avant de me coucher.
  7. Trouver une personne native avec qui échanger régulièrement.
  8. Consommer du contenu en japonais (mangas, séries, musiques).
  9. Aller au Japon.
  10. Sortir avec une Japonaise.

Vous savez ce qu’il vous reste à faire.

XIII. Dépasser la vallée de la frustration

En apprenant une nouvelle compétence, vous allez passer par 3 phases :

  1. Fun : au début, vous allez rapidement monter en compétence.
  2. Frustration : puis, la progression va ralentir, ce qui est décourageant.
  3. Satisfaction : enfin, le sentiment de maîtrise redonne un nouvel élan.

100% des gens qui échouent abandonnent (inspiré par Visualize Value)

Si vous avez appris à jouer d’un instrument de musique plus jeune, vous avez forcément vécu cette période frustrante. Certains ont abandonné. D'autres ont persévéré. Plus vieux, ils trouvent une nouvelle satisfaction à maîtriser leur instrument.

Quand je me suis lancé le challenge de battre un expert aux échecs, je suis très rapidement entré dans cette zone de frustration. J’ai réussi sur un coup de chance.

Quand j’ai voulu apprendre le grand écart, j’ai abandonné après des mois sans progresser.

Quand j’ai appris le handstand, j’ai dépassé cette phase. Tant que je reste sur deux mains, je maîtrise, et je peux m’amuser à faire des figures sans réfléchir.

→ La seule bonne raison d’abandonner est de ne plus avoir un pourquoi suffisamment fort. Si vous avez une bonne raison, pointez-vous systématiquement à l’entraînement, même quand vous n’avez pas envie. Vous serez étonné de voir à quel point le simple fait d’y aller vous motivera.

XIV. Comprendre son cerveau

Le cerveau a deux types de tissus neuraux :

  1. La matière grise, qui traite les informations en envoyant des signaux et des stimulus sensoriels aux cellules nerveuses.
  2. La substance blanche, qui est faite de tissus adipeux et de fibre nerveuse.

Lorsque l'on zoome à l'intérieur de tout ça, on y trouve des neurones (beaucoup de neurones : environ 100 milliards).

Vous en créez de nouveaux quand vous faites du sport et lorsque vous parlez à des gens.

Lorsque l’on apprend, on crée de nouvelles synapses entre nos neurones. C’est un petit peu comme si on ajoutait des voies pour circuler. On augmente le débit. Bonne nouvelle : c’est illimité !

Il n’y a donc pas de limite à ce que vous pouvez apprendre.

Cette capacité du cerveau à modifier sa structure et sa fonction au cours du temps en réponse à l’environnement (donc l’aspect dynamique et adaptatif) s’appelle la plasticité cérébrale.

Pour faire bouger notre corps, les flux électriques partent de la matière grise du cerveau puis voyagent dans la moelle épinière à travers une chaîne de fibres nerveuses avant d’atteindre nos muscles.

Deux neurones (très très schématisés)

L’axone est le prolongement de la cellule nerveuse. Il est couvert d'une substance grasse, appelée myéline. C'est cette gaine de protection qui se transforme lors de l'entraînement. On peut voir la myéline comme un isolant pour câbles électriques, empêchant la perte d'énergie des signaux.

La répétition d'un mouvement densifie les couches de myéline qui isolent les axones, formant une sorte d'autoroute pour les informations reliant le cerveau aux muscles.

La mémoire musculaire n'existe donc pas vraiment. C'est la myélinisation des chemins neuronaux qui permet aux athlètes et aux musiciens de progresser.

Le temps passé à s'entraîner n'est pas le seul critère. La qualité et l'efficacité de l'entraînement jouent également un rôle.

XV. Bien dormir

Lorsque l'on dort, le cerveau élimine les neurotoxines accumulées pendant une intense journée de réflexion. Ce lavage du cerveau n’est pas qu’une métaphore car des vagues de liquide céphalo-rachidien sont libérées pour le nettoyer.

Si l’on ne comprend pas encore entièrement le rôle du sommeil, on sait que dormir sert à oublier.

Cela peut paraître paradoxal, mais votre cerveau a besoin d’oublier ce qui n’est pas essentiel, pour conserver les souvenirs utiles que vous avez construits dans la journée.

Si vous dormez mal, vous apprendrez mal.

Et l’ennemi numéro un du sommeil, c’est le stress.

Le stress n'est pas toujours mauvais. Lors d'une situation délicate, il aide votre corps à l’affronter. Votre rythme cardiaque s'accélère. Vos sens sont plus aiguisés. L'oxygène afflue et l'adrénaline monte. Boost de concentration et d'énergie seront vos alliés si vous participez à une compétition sportive ou que vous devez parler en public.

Enfin, une hormone est relâchée : le cortisol.

Elle aide à restaurer l'énergie perdue dans la réponse, notamment en rééquilibrant les niveaux en sucre. Lorsque l'événement stressant est terminé, les niveaux de cortisol diminuent et le corps revient à la normale. Mais quand cette hormone est libérée en continu, cela commence réellement à changer votre cerveau.

Le stress chronique peut affecter la taille du cerveau, sa structure et son fonctionnement, jusqu'au niveau de vos gènes.

La régulation des synapses est perturbée. Les cellules cérébrales se font tuer à petit feu. Le cortex préfrontal réduit. Pas de chance, il est celui responsable de la mémoire et de l'apprentissage.

Si vous êtes aux prises avec du stress chronique, de l’anxiété et des angoisses récurrentes, il vous sera bien plus difficile d'apprendre de nouvelles choses.

→ Si vous sentez qu'un changement est nécessaire, je vous conseille l’atelier d’introspection. C’est un programme en 30 exercices pour trouver sa voie.

Conclusion

Vous êtes capables d’accomplir des choses incroyables.

Apprendre à apprendre, c’est aussi apprendre à se faire confiance.

Plus rien ne vous semblera insurmontable.
Vous n’aurez plus peur de vous lancer.
Et vous aurez moins de regrets.

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